PARIS: Emmanuel Macron a estimé mardi soir devant les parlementaires de son camp qu’il fallait “apaiser” et “écouter la colère” des Français après l’adoption contestée de sa réforme des retraites par le Parlement, tout en affirmant que “la foule” n’avait pas de “légitimité” face aux élus.
“S’ouvre une période devant nous où il faut apaiser, calmer, retourner sur le terrain et écouter les colères”, a déclaré le président, selon des participants à cette réunion.
“Ce que je demande à la Première ministre, c’est de réorganiser le travail du gouvernement à cette aune”, a-t-il ajouté, appelant les “cabinets ministériels” à travailler “beaucoup plus avec les parlementaires de la majorité”.
Le chef de l’État s’exprimait devant les parlementaires du camp présidentiel conviés à l’Élysée au terme d’une journée scandée par les réunions de consultations avec ministres et dirigeants de la Macronie. Et à la veille de son interview télévisée de mercredi à 13h00 sur TF1 et France 2.
Il a justifié le recours au 49.3 pour faire adopter sa réforme des retraites sans vote, malgré les protestations des opposants au texte.
12.000 POLICIERS ET GENDARMES MOBILISÉS JEUDI DONT 5.000 À PARIS
Gérald Darmanin a annoncé mardi que “12.000 policiers et gendarmes” seraient mobilisés jeudi en France dont “5.000 à Paris” pour la nouvelle journée d’action intersyndicale contre la réforme contestée des retraites.
Entre 600.000 et 800.000 manifestants, dont 40.000 à 70.000 à Paris, sont attendus dans la rue jeudi selon les estimations des services de renseignement, ont indiqué à l’AFP des sources policières.
400 à 600 gilets jaunes et 400 à 600 “éléments radicaux” pourraient également nourrir le cortège parisien, ont ajouté ces sources.
En régions, plus d’une dizaine de villes verront des “démonstrations de l’ultragauche”, selon le renseignement territorial, notamment à Rennes où est anticipée la présence de quelque 500 membres de la mouvance contestataire, a indiqué l’une des sources policières.
Venu apporter son “soutien” aux membres des forces de l’ordre, le ministre de l’Intérieur les a appelés à “ne pas répondre aux provocations de l’extrême gauche” qui, selon lui, cherche “à déstabiliser l’État en s’en prenant aux ouvriers de la sécurité”. “Ne tombez pas dans cette provocation”, a-t-il insisté.
“Utiliser la Constitution pour faire passer une réforme est toujours une bonne chose”, car “cette réforme ne passait pas si on ne prenait pas le 49.3”, a-t-il estimé, taclant ceux qui, dans son propre camp, voulaient un vote, mais en fait “préféraient qu’on perde”.
Alors que le gouvernement a survécu, à neuf voix près seulement, à une motion de censure à l’Assemblée lundi, il a assuré que ce vote démontrait qu’il n’y avait “pas de majorité alternative”.
Santé, école, écologie
“Et ce n’est pas parce que ça passe à très peu de choses que c’est illégitime pour autant, au contraire”, a-t-il insisté.
“Quelle est la main que nous n’avons pas saisie ? Je le demande”, a encore dit Emmanuel Macron pour défendre la concertation menée par l’exécutif.
Il a remercié les ministres mobilisés en première ligne, ainsi que les parlementaires qui le soutiennent, pour avoir tenu “de manière irréprochable” dans “des circonstances qui sont inédites dans notre République d’incivilité, de brutalité et de chahut” au Parlement.
“La foule, quelle qu’elle soit, n’a pas de légitimité face au peuple qui s’exprime souverain à travers ses élus”, a-t-il ensuite lancé, alors que les manifestations émaillées de tensions se poursuivaient mardi soir à Paris et ailleurs en France contre la réforme, malgré son adoption définitive. “L’émeute ne l’emporte pas sur les représentants du peuple”, a-t-il ajouté, se posant en garant de “l’ordre démocratique et républicain”.
“Il y a à l’Élysée un artificier qui se balade sur les tonneaux de poudre avec une torche”, a réagi sur Twitter le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure.
Pressé de redéfinir sa ligne pour relancer son second quinquennat, le président de la République a assuré que le cap était “clair”.
“Nous devons aussi avancer sur trois progrès majeurs pour les Français : la santé, l’école et l’écologie”, a-t-il plaidé.
“Et en parallèle, nous devons organiser la société du plein emploi pour penser les fins de carrière, les carrières longues et les carrières pénibles alors que le chômage senior est au plus bas depuis 15 ans”, a-t-il ajouté, esquissant ses prochains chantiers sans entrer dans le détail.
Selon des parlementaires, il devrait annoncer le report du projet de loi sur l’immigration qui était attendu la semaine prochaine au Sénat.
“Implicitement, pas mal de collègues craignaient la dissolution et de ce point de vue, ils ont été rassurés”, a réagi un député du parti présidentiel Renaissance. “Après, le gros du travail, c’est d’arriver à calmer ce qui se passe dans les rues.”
Pour un autre, “on est tous un peu secoués : on avait tous besoin qu’il rappelle quel était le cap”, c’est “rassurant”.